Zhexiang Li — la musique avant tout

Écouter Zhexiang Li, c’est entrer dans un Chopin d’une sincérité rare, où chaque phrase respire comme une voix humaine. Il ne joue pas pour démontrer, il raconte. La ligne se déploie avec un rubato naturel, jamais appuyé, qui laisse naître la poésie au cœur même du texte. Les plans sonores sont tenus avec une finesse qui éclaire l’harmonie de l’intérieur; on entend la clarté des voix, la souplesse du chant, ce sens du temps qui fait paraître les climax inévitables.

Sa technique, déjà impressionnante, n’est jamais mise en avant. Elle s’efface pour servir la couleur, le souffle, l’architecture. Trilles posés, legato de main gauche réellement chantant, agilité sans dureté, pédale économique et juste: tout concourt à une musicalité d’une maturité étonnante pour son âge. Il possède cette maîtrise tranquille qui permet aux nuances de vivre, du pianissimo porteur à des culminations construites par la logique musicale plus que par la force.

Ce qui frappe surtout, c’est l’évidence de son propos. Rien n’est décoratif; tout est nécessaire. On retrouve chez lui un équilibre rare entre la rigueur du style et la liberté de l’invention, une capacité à faire entendre la forme tout en gardant la fraîcheur de l’instant. À cet égard, sa lecture de Chopin n’est pas seulement prometteuse, elle est déjà pleinement habitée.

Il ne fait aucun doute, à mes yeux, que Zhexiang Li comptera parmi les très grands de sa génération. Sa combinaison d’intelligence musicale, de profondeur poétique et de moyens techniques exceptionnels le place d’ores et déjà à un niveau qui dépasse l’excellence attendue des jeunes virtuoses. L’avenir confirmera ce que l’oreille perçoit déjà avec évidence.